Ecuald

Zen tibétain

 

Je lis un remarquable livre de Sam Van Schaik qui pendant plusieurs années a étudié les manuscrit découverts dans les grottes de Mogao à Dunhuang (Chine) en 1900 par le moine taoiste Wang Yuanlu. Par la suite Aurel Stein et Paul Pelliot ont acheté de nombreux manuscrits qui sont maintenant conservés à la Bibliothèque nationale et au British museum. D’autres manuscrits se trouvent en Chine et jusqu’en Hongrie et à Berlin.

Dans Tibetan Zen, Discovering a lost tradition Van Schaik analyse et traduit plusieurs textes tibétains de Dunhuang. Selon lui, il s’agit très probablement de textes traduits du chinois en tibétain entre les 8ème et 9ème siècle à l’époque où le « concile de Lhassa » marqua la fin de l’influence spirituelle chinoise au Tibet. Elle fût supplantée à l’époque par l’influence quasi exclusive du bouddhisme indien.
L’introduction et les commentaires de Van Schaik sont érudits sans jamais être ennuyeux.

Pour sa pertinence pour un pratiquant, j’ai traduit un court extrait du texte en pages 66 & 67 d’un manuel probablement destiné aux enseignants de méditation et à leurs élèves non débutants.

« Dans la pratique graduelle, d’abord vous faites le vide des objets matériels puis, à l’intérieur, vous éliminez graduellement les caractéristiques de l’esprit en commençant par la plus grande. Bien que vous alliez finalement atteindre l’absence de caractéristiques, vous ne devez pas arrêter cette pratique avant d’atteindre la félicité de la conscience en soi. Néanmoins, purifier une multitude de concepts erronés pendant une longue durée est en soit un concept mental. Si vous continuez ainsi jusqu’à la fin de l’éon, vous resterez dominés par des forces négatives qui vous entraîneront. Ainsi cela prendra très longtemps.
Dans la pratique instantanée, toutes les apparences externes sont comprises comme étant purement esprit, et l’esprit intérieur n’est rien de plus qu’une imagination avec des concepts erronés. Quand vous êtes devenus experts en non-substantialité, vous pouvez maintenir les deux dans la vacuité. Cependant ce n’est pas la non-existence de chaque chose et de toutes les choses. Le bouddha de réalité lui-même transcende l’apparition et la disparition sans jamais changer. La conscience de ceci (en et par elle-même) purifie instantanément toutes les apparences de l’intérieur vers l’extérieur sans rechute. Ceci ne prends que peu de temps. »

Même si ce texte semble clairement évoquer la querelle gradualistes/subitistes il n’en possède pas moins une grande pertinence dans une perspective de pratique méditative.
D’ailleurs au 19ème siècle au Tibet, Jamgeun Kontrul Lodreu Thayé mettait fin à la dispute en déclarant que le gradualisme est pour les débutants et le subitisme pour les méditants plus avancés.